Va-t’en
Texte Jean Crespi
Va-t’en avec tes lèvres enfles ton œil gonfle et mon corchon du pain que tu m’as volé va-t-en dans ta lauvisse. C’est souvent qu’tu fais fâcher, Mama veut plus t’voir.
Va-t’en, t’as tout désassemblé ton pantalon flaman neuf, faudra que tu m’paies gage de ça.
Va-t’en quand j’pense que j’avais mijoté un farci... t’as comme ton feu père un bon à rien, c’pendant lui n’avait une belle corporence l’était raplot toi... c’est pourtant pas la besogne qui t’a maigri
Va-t’en luré compère tu m’as mise à la perdue tu m’mets des marteaux en tête
C’est ma faute faut pas agourmandir les enfants il a toujours eu de pommes et de confitures à son quatre heures plus qui n’en faut... V’là maintenant que le farci me reproche j’suis tout enlourdie quel gâchis
C’est ma faute pourtant j’ai été bon gouvert même au gros de l’hiver j’étais debout matin je lui préparais ses tartines je versais le lait dans la secoupe c’t’enfant ressemble tout son père pour la moralité sauf que l’v’là maigre comme une esquelette
C’est ma faute ah faut pas que j’oublie d’eccourcir les rideaux d’la chambre du haut quel embrouillage
C’est ma faute j’l’ai mal éduqué il est brouillon il laisse tout en dix-huit a fallu que j’enliasse tout le linge qui traînait
Reviens c’est une inconscience de laisser dehors un gosse de treize ans
Reviens j’te ferai des macarons au gratin
Reviens faut t’l’écrire sur du papier marqué
Reviens j’te l’dis tout de bon bien de personnes se trompent faut que j’aille mouiller la lessive personne aut’que toi me manque
Bien content qu’è m’ait foutu dehors t’as vu comme è parle : « eccourcir ! » quelle plouc
Bien content, et menteuse qu’elle est à peine j’avais mangé une petite pomme et une cuiller à café de confiture a rangeait tout, à clé, c’est pour ça que j’suis maigre
Bien content : ses macarons m’en fous
Revien ien iens...
t’entends comme è gueule
Putôt crever