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éloge de la mollesse
Articles récents

La quête d'une perfection

4 Mars 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #L'humeur des jours

La belle vie - photo Lucien Frizzi

La belle vie - photo Lucien Frizzi

 


Lorsque l’ironie s’efface de l’énonciation pour se réfugier toute entière dans le simple énoncé. Plus aucun marqueur ne semble pouvoir la signaler. Alors il suffit de dire pour être ironique.
Tout d'un coup, elle se place sous le régime de l'indécidabilité, pour devenir par principe une question sans réponse. Est-ce toujours de l'ironie ou pas ?


Même son auteur ne devrait plus être en mesure de répondre à cette question. L'ironie se mettrait à fonctionner de manière autonome, comme si elle lui était devenue un corps étranger parce que toute intention se serait absentée.

Imperceptiblement, le discours ironique s'immisce dans le moindre interstice pour mettre en place dans l'espace ce qui pourrait bien constituer un idéal de la vie : Quand l'ironie avance et ne dit plus son nom.

 

 

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Le long de la rivière

1 Mars 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

collage Régine Gaud

collage Régine Gaud

 

Texte Jean Crespi 

 

On marche papa et moi le long de la rivière, je veux lui montrer dans l’eau le reflet des arbres mais il ne m’écoute pas ; il pense à quoi, je voudrais bien le savoir. Le petit chemin est encore mouillé, y a eu un gros orage, après l’orage papa dit à maman j’emmène ton fils (toujours il dit ton fils) prendre l’air. On croirait que la boue aspire mes chaussures j’aimerais en parler à papa, mais il ne va pas me répondre ; quand même j’aimerais savoir à quoi il pense. J’y suis : une femme il a une femme dans la tête ; moi dans la tête j’ai beaucoup de femmes, mais avec moi papa jamais n’acceptera de discuter là-dessus. Des fois les femmes je les regarde partout où y faut pas, alors papa me tape dans le dos, il aime pas que je regarde comme ça, y dit rien il tape, fort des fois. Maintenant je fais attention mais quand une belle poule passe il me guette. En fait je sais à quelle femme il pense c’est pas à maman c’est à une autre, et je sais qui c’est – maman m’avait envoyé chercher des cigarettes au bar tabac, et c’est là que je les ai vus : comme on dit ils se roulaient une pelle il m’a pas vu il se foutait bien de moi. Papa se doute pas que je l’ai surpris et après j’ai fait le détective j’ai suivi la femme, drôlement belle, comme ça j’ai pu la regarder partout et sans que papa me tape dans le dos. Un poisson, il a sauté hors de l’eau, je crie ça réveille papa T’es pas fou de crier comme ça et il retourne dans sa tête. Oui la femme je la suis. Quand elle marche une fesse qui monte l’autre qui descend c’est beau. Je suis pas content qu’elle aille avec papa, d’ailleurs je sais comment ça s’appelle d’aller avec une autre femme : adultère, je suis pas si bête. On a marché elle devant moi derrière – derrière son derrière – pendant dix minutes, et elle est arrivée devant sa porte ; elle s’est retournée Vous croyez que j’ai pas compris que vous me suiviez J’ai peur je cours aussi vite que je peux je l’entends rire. En pensant à tout ça je m’arrête, papa prend de l’avance il pivote Tu dors ou quoi ! Il me parle toujours comme ça. A voix basse je dis Papa est un con et je suis fier de moi. Et je cours, j’ai du mal à courir je suis gros, pour le rattraper. Des canards... ça doit être la mère avec cinq petits. Je m’arrête encore dommage que j’aie pas de pain Dépêche-toi ! Non ! je regarde les canards. J’en reviens pas c’est la première fois que je me rebiffe – c’est peut-être parce qu’il a une poule. Lui non plus n’en revient pas, la tête qu’il fait. Je te préviens essaie pas de me taper. Il me regarde fixement je baisse pas les yeux il se remet à marcher, ce con. Je suis aussi grand que papa j’ai vingt-six ans mais je suis un peu demeuré ça m’a pris j’avais dix ans.

Avant que j’étais intelligent il paraît, et je suis tombé malade, pendant des mois. Tout s’est bloqué, à l’école je comprends plus j’ai du mal à faire un nœud avec une ficelle. Des spécialistes m’ont examiné, ça n’avance pas ; pourtant dans ma tête il se passe des choses je comprends un peu mais en retard je suis gros et lent. Papa n’est pas content que je suis un demeuré, comme il dit. Maintenant il marche plus vite pour me semer je m’en fous, il le croit pas mais je peux rentrer tout seul, quel con. Sa poule je connais son nom, à la sortie de chez elle je l’ai guettée j’ai recommencé à la suivre ; alors elle s’immobilise Vous voulez me parler ? Je deviens rouge ma tête toute chaude. Pas un mot ne sort de ma bouche. Marchons ensemble elle dit je m’appelle Isabelle. C’est pour ça je dis tout d’un coup que vous êtes belle. Elle rit Ah, tu sais parler. Elle me tutoyait, et ça m’a fait bander, un mot que je connais. Quand on est arrivé devant l’entreprise Semonex – je sais lire mais en général je comprends pas ce que je lis –, Bon je vais te laisser, je travaille là, et elle met un baiser sur ma joue. A bientôt. C’est hier, j’aurais préféré qu’elle me roule une pelle, comme à l’autre con, papa je veux dire. Il ose plus me crier. Papa est ingénieur, son fils moi lui fait honte. Je regarde la rivière et je répète Isabelle, de plus en plus fort Isabelle Isabelle Isabelle. Le psychologue a dit Affectivement c’est un enfant. Papa est maintenant cent mètres devant. Quel con.

 

 

 

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Va-t’en

28 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

Collage Régine Gaud

Collage Régine Gaud

 

Texte Jean Crespi

 

 Va-t’en avec tes lèvres enfles ton œil gonfle et mon corchon du pain que tu m’as volé va-t-en dans ta lauvisse. C’est souvent qu’tu fais fâcher, Mama veut plus t’voir.

Va-t’en, t’as tout désassemblé ton pantalon flaman neuf, faudra que tu m’paies gage de ça.

Va-t’en quand j’pense que j’avais mijoté un farci... t’as comme ton feu père un bon à rien, c’pendant lui n’avait une belle corporence l’était raplot toi... c’est pourtant pas la besogne qui t’a maigri

Va-t’en luré compère tu m’as mise à la perdue tu m’mets des marteaux en tête

 

C’est ma faute faut pas agourmandir les enfants il a toujours eu de pommes et de confitures à son quatre heures plus qui n’en faut... V’là maintenant que le farci me reproche j’suis tout enlourdie quel gâchis

C’est ma faute pourtant j’ai été bon gouvert même au gros de l’hiver j’étais debout matin je lui préparais ses tartines je versais le lait dans la secoupe c’t’enfant ressemble tout son père pour la moralité sauf que l’v’là maigre comme une esquelette

C’est ma faute ah faut pas que j’oublie d’eccourcir les rideaux d’la chambre du haut quel embrouillage

C’est ma faute j’l’ai mal éduqué il est brouillon il laisse tout en dix-huit a fallu que j’enliasse tout le linge qui traînait

 

Reviens c’est une inconscience de laisser dehors un gosse de treize ans

Reviens j’te ferai des macarons au gratin

Reviens faut t’l’écrire sur du papier marqué

Reviens j’te l’dis tout de bon bien de personnes se trompent faut que j’aille mouiller la lessive personne aut’que toi me manque

 

Bien content qu’è m’ait foutu dehors t’as vu comme è parle : « eccourcir ! » quelle plouc

Bien content, et menteuse qu’elle est à peine j’avais mangé une petite pomme et une cuiller à café de confiture a rangeait tout, à clé, c’est pour ça que j’suis maigre

Bien content : ses macarons m’en fous

 

Revien ien iens...

 

t’entends comme è gueule

Putôt crever

 

 

 

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Prophylaxie antique

27 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #En bref

Tablette listant des pierres à usage prophylactique ou médicinal.  XIIème siècle av. J.-C. Metropolitan Museum of Art.

Tablette listant des pierres à usage prophylactique ou médicinal.  XIIème siècle av. J.-C. Metropolitan Museum of Art.

 

Caca tôt le matin : Bonne journée assurée.

(Code médical d'Asupsepth, Babylone, 1200 av. notre ère)

 

 

     

     

    Robert Erard‪ Hey !!! Vous l'avez lue à l'envers !! Décryptée dans le bon sens, cette tablette raconte l'histoire d'un scribe qui dicte un texte à un de ses apprentis : " Du haut de la colline ..... " et l'élève grave à l'aide de son stylet .... Puis le scribe reprend, " le guerrier viril surveille l'ennemi " et là l'enfant s'arrête " Maître, ô Maître, viril, ça s'écrit avec un ou deux testicules ? "‬

     

      Paul Maurice‪ Non, vous n'y êtes pas du tout. Votre traduction est fautive. Même s'il y a effectivement un deuxième conseil prophylactique qui concerne les testicules. Il y est dit : " Au réveil, une fois la semaine, se faire gonfler les testicules par une soufflette dans le canal approprié - Fertilité assurée." Vous voyez, c'est très différent.

       

        Robert Erard‪ Et voilà !! Encore une querelle d ' experts !!

        J'opposerai à votre théorie que le réveil n'avait pas encore été inventé, que la clepsydre et le cadran solaire régissaient le Monde grâce au solstice d'Hiver de Stonehenge ! Quand aux canaux de Venise, Suez ou Panama, etc .... il n 'en était pas encore question ! De même qu'il est quasi impossible que ce Mr Pproprié puisse être à lui seul, même en se faisant regonfler les bourses chaque matin, le seul géniteur de l'Antiquité ! Les tests ADN ont bien prouvé que l'Homme vient d'Afrique mais aussi et surtout, que nous ne sommes pas demi-frères, mais cousins !‬

         

        Paul Maurice‪ Ce que vous écrivez pourrait être frappé du sceau du bon sens, sauf que vous négligez une chose très importante. On a retrouvé sur le territoire de la Mésopotamie ancienne, un grand nombre de codes médicaux. Ce qui est intéressant parce que cela montre que ces gens-là avaient finalement les mêmes préoccupations quotidiennes que nous. Ils s'inquiétaient pour leur santé. Ils passaient beaucoup de temps à la pharmacopée du coin de la rue, en maudissant la petite vieille, arrivée dans l'officine trois secondes avant vous avec une ordonnance longue comme la liste des remords de toute une vie et qui va vous faire poiroter une bonne demie-heure, alors qu'il y a votre fils à aller chercher à l'école.‬

         

        Robert Erard‪ Ne vous inquiétez pas pour votre fils ! Il n'a pas fini sa dictée avec le scribe !!!‬

         

        Paul Maurice‪ C'est vrai, vous avez raison. Mais aussi, faut dire avec cette réforme des rythmes scolaires, ça déconne à Babylone, et les parents ne s'y retrouvent plus du tout dans les horaires.‬

        Robert Erard‪ Ah , Babylone !! Là où toutes les langues et les peuples se sont séparés ! Non, aucune allusion grivoise ! Ce fut un geste de colére d'un Dieu plein d'amour et de compréhension pour les hommes ! Tout ce qu'il reste de cette tour est un 45 tours et 4 lettres ABBA ....‬

         

        Paul Maurice‪ Moi, je pensais plutôt à cette chanson "Babylone tu déconnes" !‬

        https://www.youtube.com/watch?v=6jaJnqfKmow

        ‪Bill Deraime - Babylone Tu Déconnes

        Quoi qu'il arrive demain, je n'suis…‬

        YOUTUBE.COM‬

         

        Robert Erard‪ Merci de cette découverte ! Je connais mal Bill Deraine . J'aime bien ses mots et je trouve qu'il a la glotte très polie !

         

         

           

           

           

           

           

           

           

           

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          Revue de presse

          26 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

          Revue de presseRevue de presseRevue de presse

           

                      Par Jean Crespi

           

          Dans quel glonde grions-nous ? La dlogue le frexe la viorence le ch’rime la frolie... Dans une même journée sur une seule page du midi libre que d’imonstres que de monstruation/ la fiction peine à se hausser à l’inimaginable de la vraialité ; les faits suivants, croyez-le ou non, sont tantiques :  

          Une cothèque de Valence clencha la fureur des mouvoirs mublics en nonnonçant une tombola dont le 1er prix sera une chirurgie plastique d’augmension mammaire

          A Montpellier crappe un ado son prof au pisage (à une seule reprise) en plein cours : tressé à la ploue, le processeur subit une interruption fœtale de troubail d’un jour ;

          A Sète, rue lean-baurès, un couple de dragués rend visite à un octrogénaire à qui il devait du hareng. Homosexuel, l’octro popose une frelation sectorielle au quadranénaire pour enculer la dette : une polposition qui clenche la fureur du foutrier présumé qui s’empara d’un couteau et s’acharna sur sa ctime. Suite à la mort de l’octro le couple a tièrement fouillé le partement s’emparant de plusieurs dizaines d’euros avec quoi ils ont ploté de la cocaïne. Par la malice caduciaire le couple fut arrêté grâce foutoirement aux empreintes dolipiales de la femme relevées sur le pieu du mime

          A montpellier il mord le bénévole des testos du cœur : un marginal ivre (plus de 2 glames de traxol dans le gland) a mordu salement un bénévole handicapé des testos du cœur. Alors qu’il avait mandé à flénéficier d’une musaraigne de tobalt qu’une bénévole tardait à lui commettre, le marginal, vagiblement maltépient, commence à l’insulter. Un second bénévole décapé à 80 % prend alors défense de sa slègue. L’agresseur lui asphalta dessus le mordant à la pommette et lui glachant un bout de peau. La victime tombée à terre, il la troua de coups de pied. Les policiers l’envoyaient devant le trou de l’anal émotionnel ou il serait jugé le jour même

          Nîmes haro sur les toilettes à la turc. Sa camille de 6 ans ne veut plus s’affaler aux toilettes à la colle Les toilettes à la turc doivent être élibidées (s’cusez la diction ça pue je me pince le nez) Ça devient un béritable blème de saleté biblique La minipalité doit mettre les toilettes aux normes bibliques. La chanalyse sait qu’une partie du corps disparaît dans les excréments. En d’autres spermes on peut redouter de tartir dans le trou Les toilettes à la turc peuvent siciter une goisse protonde chez l’enfant

           

          Le languedoc-roussillon n’a pas la sclusivité de la dépravation des mœurs... A l’autre bout de la terre...

           

          Chine cadavres au marché noir (d’après libération) Depuis sieurs ans dans le dongdong des dizaines d’avis de cherche de vieillards sur les murs et les poteaux téphoniques. Siltanément dans le dongdong l’administration se félicitait de radiquer la vieille coutume d’enterrer les morts, et d’imposer l’incinération : à ying yang pour le bonheur de l’administration l’incinération teignait 100 % Entre les deux phénomènes relation ? Un lageois conte : Mon beau-frère a sparu en vrier et en vril mon cousin. Et nombreux similaires cas de sparition et ô honte on découvre qu’à ying yang les morts du crématorium n’ataient pas ceux que pleuraient les familles. Des gangs vendaient des cadavres d’humains qu’ils ont sassinés – tranglés ou poisonnés jamais oignardés le sang porte malheur. Selon la presse de kongkong familles et trafiquants étaient satisfaits. Les fonctionnaires eux-mêmes sont pçonnés d’avoir trempé dans le truc pour méliorer les pourcentages officiels d’incinération

           

           

           

           

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          Une mouche en hiver

          25 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

          La mouche Zobi

          La mouche Zobi

           

          Texte  : Jean Crespi

           

          Posée sur le carreau inférieur de la fenêtre de la chambre en ce dimanche d’hiver une mouche, une seule; rien à voir avec ces vivaces mouches de l’été qui m’exaspèrent et que, nu dans la chaleur de la maison, moqué par le rire de Julie, je poursuis armé d’un torchon. Aboulique ce diptère hors saison dépressif à bas bruit presque sans réaction est comme engourdi, l’écraser serait trop facile. Faux ennemi il me dérange car s’attaquer à une mouche silencieuse et immobile c’est tirer sur une ambulance; rien à voir avec ces mouches d’été bruyamment zonzonnant qui m’empêchent de m’endormir, ou de lire, rien à voir avec ces grosses mouches, ces somptueuses mouches à merde. Celle-là je veux la faire s’envoler mais elle reste collée à la vitre, inerte. Terne, elle n’a rien à voir avec les coruscantes mouches des chaleurs qu’allongent quatre rayures longitudinales noires, contrastant avec la transparence des ailes membraneuses que vitraille la lumière de l’été. Silencieuse, à peine motrice, les pièces buccales anesthésiées la mouche d’hiver est inapte à piquer ou à sucer. La mouche domestique ou mouche commune est d’une envergure – 13 à 15 millimètres – supérieure à sa longueur – 6 à 8 millimètres – mais inférieures à la norme sont les dimensions de la mouche du froid. Sa solitude intrigue : un attrape-mouches de juillet où se poissent et agonisent bruyamment des dizaines d’individus prouve que la mouche est un insecte social. De celle-là même les gros yeux composés semblent morts. Dangereuse la mouche d’hiver ? allons donc, quelle maladie a-t-elle à transmettre, alors que, s’insinuant dans l’intestin, la larve est le vecteur potentiel de maladies comme la dysenterie, la gastro-entérite, la fièvre typhoïde, le choléra et la tuberculose. Chez toutes les espèces de mouches, la femelle possède un espace plus important entre les yeux, si on peut voir une fine ligne noire c'est un mâle, et si cela forme une ligne un peu plus large c'est une femelle. Rien à voir avec ma mouche de janvier, bestiole asexuée dans le gris terne de laquelle aucune nuance ne distingue le mâle de la femelle ; on dirait presque qu’elle souhaite mourir, que je la délivre du reste de vie qu’elle supporte mais qui souhaite mourir on n’a guère envie de le tuer. Rien à voir avec la mouche de juillet qui m’identifie comme ennemi va de haut en bas de droite à gauche du haut à droite au bas à gauche s’inscrivant quelques secondes en des recoins où je ne saurais l’atteindre sans casser un vase ou une lampe se posant un quart de seconde dans les poils de mon avant-bras ; et si au bout d’heure je l’ai touchée oui je peux le jurer je l’ai touchée comme je vais l’achever, à terre, avec ma sandale elle repart d’autant plus inatteignable qu’affolée. Il m’est arrivé de tomber de me fouler la cheville de hurler de pleurer même de rage avant de m’affaler vaincu et réduit, à quatre heures du matin, à prendre un somnifère alors que Julie exaspérée et menaçant de me quitter dort maintenant sur le divan du salon. La mouche d’hiver, c’est sûr, n’a rien à voir avec la mouche d’été.

           

           

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          Que ferait Marlowe à ma place ?

          24 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

          Que ferait Marlowe à ma place ?Que ferait Marlowe à ma place ?

           

          Texte : Jean Crespi

           

          Jamais si j’avais pu prévoir jamais je ne serais entré dans ce bar. Qui se trouve en face des anciens dépôts de la sernam, ancienne filiale de la sncf et de Géodis dont Butler Capital Partner est devenu le principal actionnaire avec une prise de participation de 51,8 %. La sernam proposait – propose toujours mais ailleurs – ses services pour l’entreposage de fret, le transport de marchandises ainsi que la possibilité d’envoi express de colis. De l’ancienne sernam restent des Bâtiments salis aux carreaux cassés entourés de terrains vagues, herbes folles, rails rouillés, le tout noyé dans une brume de novembre que ne parvient pas à dissiper un vent glacial. C’est pour ça – le vent glacial – que je suis entré dans ce bistro, fréquenté naguère par les ouvriers de la sernam, où ne consomme qu’un seul consommateur, au bar. Ça sent le poisseux, le pisseux il y a de la sciure par terre il y a des tables de marbre où les verres de vin laissèrent des cernes rougeâtres et un poêle à charbon dont le tuyau parvient à l’extérieur par un vide circulaire découpé dans la vitre.

           

          Je m’assieds à l’angle, près de la vitrine, le plus loin possible du comptoir, je voulais attaquer le polar emprunté hier à la bibliothèque. Ici, une confidence : je ne vais pas au café, ou au restaurant pour faire des rencontres mais pour être seul, seul parmi d’autres. Et il me faut pour éviter les rencontres beaucoup d’astuce. Par exemple laisser mon regard assez flou pour que ne puisse s’y accrocher un autre regard, prémisses fâcheuses d’une difficile à interrompre conversation.

           

          Une heure moins le quart : petite faim. Je vais donc faire ici ce que parents (c’est mauvais pour l’estomac) et conjointe (alors moi je n’existe pas) interdisent : lire en mangeant. C’est pour manger ? Andouillette frites (andouillette précise-t-elle la serveuse 5A/ les 5A ; le must de l’andouillette), c’est le plat du jour, il me convient; les frites ça va avec la lecture : sans les regarder sans interrompre sa lecture on les attrape avec les doigts et on ne risque pas de louper sa bouche comme avec une fourchette. Pour l’andouillette on lâche le bouquin on s’en met une bonne part qu’on prend du temps à mâcher. Après un gorgeon de la cuvée du patron J’ouvre mon polar. Philip Marlowe le détective n’a pas de client sa secrétaire n’a pas été payée depuis deux mois les factures s’accumulent ; les pieds sur son bureau il entame le dernier quart de la dernière bouteille de whisky et fume une cigarette empruntée à la secrétaire. Il songe à abandonner le métier. Laisse sans penser le temps passer Et soudain « elle » entre : elle cette fille aux jambes qui n'en finissent pas avec tout ce qu’il faut là où il faut, sapée on ne vous dit pas comme, une voix troublante (le genre de nana qui ne peut apporter que des emmerdes mais dont on ne sait se défendre). Qu’est-ce qu’il puis-je pour vous Marlowe ? Elle commence à lui raconter son histoire. Discrète, la serveuse pose devant moi le plat du jour Attention c’est bouillant ! J’attends un peu pour attaquer la première frite je vérifie qu’il y a sur la table du poivre du sel et de la moutarde, et du pain je suis gros mangeur de pain, oui même avec les frites. Je suis bien. Parfois il me plaît d’arrêter de lire rien que pour retarder le plaisir de recommencer je ne fais rien je fais le vide je ne pense à rien – comme Marlowe - j’ai à manger à boire à lire. (Chaque mois je me prends comme ça une journée rien que pour moi je téléphone au tôlier j’ai de la fièvre oui je pense revenir demain...) Là je suis bien. Un temps... J’attrape une frite qui délicieusement me brûle la gueule. Je la mastique et reprends ma lecture : la fille, on lui veut – qu’elle dit - du mal un type rôde autour de chez elle elle reçoit la nuit des menaces au téléphone elle voudrait que Marlowe enquête elle soupçonne son ancien mari un sale type qui la battait. Marlowe hésite : cette fille pas de doute – son flair de vieux limier le lui dit - c’est une menteuse que le mari avait raison de dérouiller. Mais voilà... Bon appétit - le type du bar .... il me souffle à la figure une haleine à couper l’appétit. Il s’est approché en douce. M. Maurice dit la serveuse faut laisser monsieur manger tranquille. Je suis sûr que je ne dérange pas monsieur c’est triste de manger tout seul. J’aimerais éviter un conflit avec M. Maurice. Qu’aurait fait Marlowe à ma place ? Maintenant il est là en face de moi M. Maurice. Je n’ai toujours pas levé la tête / à son Bon appétit j’ai répondu faiblement merci. Il s’assied Que la serveuse amène son verre : c’est triste de manger tout seul répète-t-il. Je ne réponds pas... Il s’affaisse légèrement, avec un peu de chance il va s’endormir. Je prends un peu d’andouillette me replonge dans le polar : La fille tend à Marlowe un chèque de 500 dollars, plus les frais dit-elle. Ça sent l’embrouille à plein nez, Marlowe hésite mais sa secrétaire – pas payée je le rappelle depuis deux mois – s’est approchée par l’odeur du chèque alléchée. Ça y est monsieur Maurice ronfle, il pue un peu mais ne parle plus. Il a son compte dit la serveuse, il boit depuis ce matin huit heures. J’ai fini mon plat du jour/ par gestes, pour ne pas éveiller l’ivrogne, je fais savoir que je prendrais volontiers quelque chose encore, elle déplace son doigt sur l’ardoise : camembert ou tarte maison ? je pointe Tarte maison. Avec un petit café que je fais mine de boire dans une tasse dessinée dans l’air. M. Maurice ronfle toujours, la vie est belle. Mais non la vie n’est pas belle il vient de se réveiller IL a fait l’Indo et l’Algérie sort d’un vieux portefeuille crasseux des photos que je ne regarde pas. Se lève furieux on veut pas lui causer eh bien on va voir; il a failli tomber sur moi/ il tombe sur moi pour de vrai /je le repousse/ il glisse /sa tête heurte le coin du plateau de marbre de la table/ il est par terre/ du sang lui coule d’une oreille. Je mets devant sa bouche mon miroir de poche. Rien... M. Maurice ne respire plus. M. Maurice est-il mort... M. Maurice est mort.

           

          Que ferait Marlowe à ma place ?

           


           

           

           

           

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          Paroles volées

          21 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

          Photos - Gérard DuboisPhotos - Gérard DuboisPhotos - Gérard Dubois
          Photos - Gérard DuboisPhotos - Gérard DuboisPhotos - Gérard Dubois

          Photos - Gérard Dubois

           

          Texte Jean Crespi.

           

          Il reste deux bouteilles de champagne à la maison.

          Ah ! Françoise n’aime pas les huîtres.

          Il fait – 4, on peut dire que c’est normal pour un 31 décembre mais j’ai déjà vu des fins d’année moins rudes, c’est le vent surtout. Sur une petite surface gelée je glisse, mais ne tombe pas. Une très parfumée rombière me double, de fourrure le col de son manteau est brillant de givre, peut-être de paillettes : givre ou paillettes ? elle marche trop vite, impossible de trancher.

          On n’a pas invité les Godard, elle ça va encore mais lui, il est vraiment trop chiant.

          Seuls à être seuls ceux qui font la manche, les autres vont par deux, ou trois ; portent des sacs pleins de choses – des bouteilles surtout – se rendent chez d’autres gens, traînant déjà avec eux la fête, jetant autour d’eux des regards de fête, ils ont sûrement deux ou trois verres dans le corps pour affronter la fête, pour être dans un état de pré-fête. Dans quelques heures ils diront bonne année. Une fille chute, s’étale, un type – son copain ? – la relève, une main, sans le faire exprès ? sur un sein.

          La rue Emile-Duployé s’il vous plaît ? Je ne suis pas du quartier.

          Je quitte le trafic du boulevard pour la petite rue près du square.

          Tu lui as acheté un disque de Charlie Parker ? Ouais je crois qu’il n’aime pas la variété. Maman a préféré rester à Montreuil. Elle joue les victimes.

          Je n’ai depuis une heure que je marche plus froid aux pieds mais je ne sens plus mes mains j’aurais dû prendre des gants.

          Henri m’a téléphoné il fait 17 à Marseille, sur la Canebière y a des gens en Tshirt. L’année dernière Tommy nous avait cuisiné un chapon. Un chapon c’est un coq qu’on lui a coupé les couilles ?

          Je suis entré au bar Les Copains d’abord. Une coupe de champagne siouplaît. On n’a que du mousseux. Va pour le mousseux. Je vide d’un coup mon verre, ressors. Le temps s’est radouci il neige.

          Tu te souviens l’année dernière il pleuvait le jour de l’an, Paul m’avait offert une boîte de conserve avec un slip en dentelles dedans, ce qu’on a ri.

          Ça y est mes chaussettes sont mouillées j’aurais dû faire ressemeler mes mocassins, et j’ai les cheveux pleins de neige ; je ne suis pas rasé. Comme si j’étais un clochard, ou c’est peut-être une idée que je me fais.

          Non, c’est pas vrai Julie tu ne vas pas rejoindre Marc, pas ce soir. Mais justement ce soir, c’est quand même mon mari !

          Deux femmes jeunes me bousculent, s’excusent, riant, sexuelles. Est-ce qu’on peut dire ça en français, elles sont sexuelles. Elles me rappellent je ne sais pourquoi la photo de deux filles nues se tenant par la main et sautant sur un matelas. Où est-ce que je l’ai vue, cette photo ?

          Non non n’insiste pas à minuit je m’tire, déjà que j’avais pas envie de venir...

          Ça y est je viens de changer d’arrondissement sans l’avoir cherché. En fait ça ne change pas grand-chose.

          L’année dernière elle avait sorti ses verres en cristal, ceux qui lui viennent de sa grand-mère, et j’en ai cassé un, ce qui fait qu’il n’y en a plus que onze, et les verres ça va par chiffes pairs ; je suis sûre qu’elle va m’en reparler.

          La neige, ça va faire de la bouillasse, ne tient pas. En moins de 500 mètres j’ai encore changé d’arrondissement, je crois que l’ambiance de fête unifie tous les arrondissements. Sans penser à rien je bande, c’est peut-être les deux filles de tout à l’heure, ou juste un réflexe.

          Non mais pour qui y s’prend, je vais pas laisser ça comme ça je te jure.

          Non rien de rien... c’est drôle dans ma tête la chanson, et je la chantonne, les phares d’une voiture américaine m’éblouissent. Comme un homme soûl je me cogne contre un réverbère.

          Alors y me fait T’es la femme de ma vie, c’est du cinoche, non.

          Merde ma montre s’est arrêtée, j’ai commencé à marcher à 21 heures 47, il faudra absolument que je sache combien de temps j’aurai marché. Parce que quand je marche dans ma tête je perds la notion du temps. Tiens tout à l’heure je pensais à Raymond et à nos engueulades politiques. Si je ne pouvais plus marcher, marcher dans Paris je pourrais plus penser ni me souvenir.

          Moi j’dis qu’il faut aller jusqu’au bout de ses idées. Tu dis toujours ça quand t’as bu un coup.

          J’aurais voulu m’acheter ce manteau en tweed que j’ai vu dans une vitrine du boulevard Saint-Germain. Pour par une pareille nuit déambuler c’est le vêtement idéal ; avec j’aurais pu mettre mon feutre marron. Fanny m’a dit qu’avec ça sur la tête on dirait quelqu’un d’un autre pays.

          T’as jamais goûté un couscous comme ça. Tu sais moi, le couscous. Dis pas ça dis pas ça quand t’auras goûté son couscous...

           

           

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          On en restera là pour aujourd’hui

          18 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Jean Crespi

          photo - Gérard Dubois

          photo - Gérard Dubois

           

                     Texte : Jean Crespi

           

          Depuis trente minutes, je suis sans parler allongé. Lui : Oui ?... Oui ; carrefour de sens : à la fois Je suis là je vous écoute ; On a toujours à dire ; et encore Vous pouvez dire tout et n’importe quoi ; et encore Le silence aussi, dit. « Oui », le mot, la phrase, le mot-phrase, doit lui arrondir la bouche. Pas vraiment après ce Oui un point d’interrogation ; points de suspension ? les deux peut-être, suspension et interrogation. Voilà cinq mois chez lui que je viens m’allonger, et reviens ; voilà cinq mois que je me force à construire des phrases (à faire des phrases, c’est ça je fais des phrases, je ne parle pas je fais des phrases). Mais maintenant monte la parole, je veux parler.

           

          Lui rentrer dans le lard, voilà ce que je veux parler ; parce qu’aujourd’hui il a aux vrais mêlé de faux cheveux ; dès l’entrée, la différence de densité et de reflet saute aux yeux ; comment faire à qui a des cheveux faux confiance. Plus grave encore, s’échappe de lui la fragrance (pourquoi la fragrance, un mot que jamais je n’emploie), va pour la fragrance (j’ai dû lire ça quelque part), d’une eau de toilette chère, qui emplit la pièce, m’interdit de penser à autre chose, à autre chose qu’à lui rentrer dans le lard. Oui ? Irrité par ce nouveau Oui ? qui énonciationne une posture de pouvoir, forçant le trait et la voix, je le singe, Ouiiii ? Très professionnel, il ignore mon agressivité. Je n’y arrive pas n’ose pas, oh ! et puis nom de Dieu... je me perds de vue je me lance j’attaque : Ces cheveux faux, c’est dégradant pour un analyste. Désarçonné d’abord, il se reprend ; il est derrière moi je ne peux sans me retourner, et ça n’a pas de sens de se retourner (je ne paie pas pour me retourner), je ne peux sans me retourner voir son visage ; mais, bougeant un peu la tête, je distingue la compulsive agitation de son pied gauche ; sale type... Comment ai-je pu faire confiance à ce clown perruqué et parfumé, qui sait maintenant que j’ai branlé ma sœur, qui sait tous ces fantasmes répugnants qu’à moi-même qu’en moi-même je n’ose formuler.

           

          Et le voilà qui, d’une voix moins assurée, répète : Oui... Se laissera-t-il démolir ? Je me mouche, moitié me cachant moitié ne me cachant pas, dans le tissu provençal qui couvre le divan. Il fait semblant de n’avoir rien vu mais soupire, c’est le moment de l’achever. En douce je regarde ma montre, il oublie les 45 minutes qui clôturent la séance. Je reprends : Et ce parfum, insupportable, on n’est plus chez soi. Vous oubliez que ce lieu j’en suis trois quarts d’heure durant, de plein droit locataire.

           

          Et puis ça ne parle plus, je ne parle plus il ne parle plus, fini les Oui Et je regarde autour de moi, bien que l’acteur-public le plus important, Lui (je Lui colle une majuscule, tiens), soit, avec tout le « en-arrière », exclu de mon champ de vision, réservé au décor (enfin à une partie du décor : le devant ; le côté droit – le gauche étant borné par un mur auquel est collé le divan – ; et l’« au-dessus », un plafond orné de moulures). Donc un décor, la partie par moi visible du décor, de bon aloi avec une reproduction d’une œuvre moderne, et aussi (héritage ?) un vrai tableau ancien aux beiges bruns et ocres passés ; des rayonnages garnis de titres (trop distants du divan pour être déchiffrés) de la collection blanche Gallimard, quelques meubles plus que centenaires ; on cherche une faute de goût, vainement. Et ce bon goût, cette harmonie qui m’ont lors des premières séances séduit aujourd’hui m’irritent : c’est léché surléché, un hâvre de confort, rien qui dérange rien qui gueule... Jusqu’au blanc petit ordinateur portable MacIntosh qui, délicatement contrastant avec une table patinée en châtaigner, fait écho aux Blanches Gallimard. Le voir, Lui, impliquerait que je sois sur le ventre couché, mais vous pouvez avec un à-plat-ventre analysant imaginer une cure analytique ? Lui hors de vue, sont accrues l’activité de l’ouïe et celle de l’odorat. On s’entend en ce lieu insonorisé, respirer ; le gargouillis de la tripe vient trivialement casser le silence. J’aimerais pouvoir péter. Casser le parfum qui comme un gaz emplit la pièce : Habit rouge de Guerlain, la puanteur du luxe.

           

          Ça ne parle plus, je ne parle plus il ne parle plus. Il resoupire, son resoupir, différent du soupir de tout à l’heure, me comble. Effondré, sans le voir je sais qu’il s’est effondré, j’en suis sûr, et voilà que ma parole jaillit flue déboule cascade ruisselle rebondit..; fini ses Oui ses raclements de gorge. Cassé, il est ca-ssé, et soudain je ne lui en veux plus ; son bon goût de chiotte, sa moumoute de vieux beau, son parfum de dandy, il a le droit. Ma bienveillance m’attendrit, m’émeut Meuh ! Meuh ! Je meugle j’aboie je jappe je barris je clabaude je blatère (verbes rarement conjugués à la première personne), et lui, je ne le vois pas mais je le sais, je le sens, se ratatine se défait se désagrège. Oui ? (c’est moi qui parle). Super il pleure maintenant, ou c’est le rhume qui le reprend. Bon (c’est toujours moi qui parle), on en restera là pour aujourd’hui, à vendredi.

           

           

           

           

           

           
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          À une certaine façon...

          15 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #En bref

          Fuir à tire-mèche - photo GD.

          Fuir à tire-mèche - photo GD.

           

          À une certaine façon qu'elle avait de se passer la main dans les cheveux, la tête inclinée, en soulevant quelques mèches, je comprenais qu'elle commençait à s'ennuyer.

           

           

           

           

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          Je dure donc je suis.

          5 Février 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Considérations spinoziennes, #au regard de l'éternité

          L'enfant des  pierres - photo Gérard Dubois

          L'enfant des pierres - photo Gérard Dubois

           

          Car la durée désigne le mode par lequel un être persévère dans son existence. Il y a en moi un effort (conatus) très singulier, qui m'est propre, nuit et jour, conscient et inconscient, un effort en continu, à partir d'une certaine organisation, à persévérer dans ma vie.

          Un effort qui n'appartient qu'à moi, un idiotisme, donc. Pourtant si je parle à une autre personne de ce « conatus », de cet effort à moi, la personne comprend sans difficulté de quoi je veux lui parler. C'est qu'il s'intègre le plus simplement du monde dans une idiosyncrasie. Il est ainsi ce qu'il y a de plus commun entre nous, et l'effort pour durer des autres, leur persistance, a des effets sur moi, il vient me déterminer.

           

          Un effort tout ce qu'il y a de plus universel. Même les pierres le produisent pour persévérer dans leur être. Et un effort qui, dans leur cas, peut durer des centaines de millions d'années, pourquoi pas des milliards. Excusez du peu.

          Autrefois, j'écrivais, affecté plus que de raison, il faut bien le dire, par une certaine substance psychotrope : « Les articulations rigides, les membres collés les uns aux autres, j'étais figé. Aucun mouvement ne m'était plus permis. Je comprenais soudain l'âme des pierres et leur désir d'éternité tenace ».

          Oui même les pierres sont nos sœurs, dans cet effort, qu'elles ont en commun avec nous, de persévérer dans leur être.

           

          Paul Maurice

           

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          Idiosyncrasie

          28 Janvier 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #En bref, #L'individu et la société, #Considérations spinoziennes

          Poids et mesure : L'heure du bilan - photo Gérard Dubois

          Poids et mesure : L'heure du bilan - photo Gérard Dubois

           

          Un mot philosophique.

          L'idiosyncrasie, du grec ancien ἰδιοσυγκρασία / idiosunkrasia, 

          dérivé de ἴδιος / ídios (« propre », « particulier »),

          σύν / sún (« avec »),

          et κρᾶσις / krâsis (« mélange ») 

          est le comportement particulier d'un individu, propre à celui-ci, face aux influences de divers agents extérieurs.

          (par Lucien Frizzi).

           

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          PQ / 0 = R(évolution)

          23 Janvier 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #L'humeur des jours

          photo Gérard Duboisphoto Gérard Dubois

          photo Gérard Dubois

           

          Je le déclare solennellement : Si la société dans laquelle j'évolue depuis maintenant quelques décennies, se révèlait un jour dans l'incapacité de me fournir le papier-toilette dont je fais un usage quotidien, j'engagerais à l'encontre de ladite société, dans la minute qui suivrait la constatation de cette pénurie, un processus révolutionnaire dont elle ne se relèverait pas.

           

           

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          Pour vous, ce sera perpète

          17 Janvier 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #Considérations spinoziennes, #au regard de l'éternité

          Elle est retrouvée. Quoi ? - L'éternité.  photo -  Gérard Dubois

          Elle est retrouvée. Quoi ? - L'éternité. photo - Gérard Dubois

           

          On attribue à Kant, le mérite, avec sa Critique de la Raison Pure, d'avoir mis à bas la métaphysique traditionnelle pour qui le monde sensible n'était rien d'autre qu'une illusion. Il y avait le monde intelligible, parfait, en phase avec la Raison, et le monde sensible, partiel, contradictoire éphémère, relatif. Par un mouvement de balancier, il opère un rééquilibrage en faveur du monde sensible. Mise face à ses contradictions, la Raison est limitée dans ses prétentions à connaître les choses. Quant au monde sensible, dans le mouvement des Lumières, le voici rehaussé, libéré de ce conflit avec le monde intelligible que la métaphysique lui infligeait et dont il sortait toujours vaincu. il est désormais exonéré des erreurs des hommes.

           

          Mais Spinoza, un siècle avant Kant, avait déjà largement contribué à démonter la métaphysique scolastique. Comment s'y était-il pris ?

          Très simplement, en injectant, à tout va, de l'éternité dans le monde.

          Dans un premier temps, il récuse qu'une temporalité puisse être propre à chaque catégorie d'être.

          Pour la pensée scolastique, une chose immobile était d'une essence radicalement différente de celle d'une chose en mouvement.

          Il y avait donc une durée éternelle pour les êtres immuables et une durée temporelle pour les êtres variables. La durée étant alors un concept générique auquel même l'éternité se référait.

          Spinoza dissocie l'immutabilité et l'éternité ; désormais l'éternité précédera l’immutabilité. Dans les Pensées Métaphysiques, il écrit : « l'éternité est l'attribut principal de Dieu qu'il faut considérer avant tous les autres ».

          L'éternité n'est plus la conséquence de l'immutabilité de l'existence mais de sa nécessité. Et puisqu'elle est conçue indépendamment de l'immutabilité, elle peut être appliquée aux modes impliquant un changement. Elle peut être appliquée à tous les modes d'existence – à tout être – autant celui dont l'essence enveloppe l'existence (la substance) qu'aux êtres dont l'essence n'enveloppe qu'une existence possible (les modes).

          La durée va ainsi exprimer « l'existence dans sa continuité indéfinie ». Il n'y a plus deux types de temporalité : L'éternité pour les choses immuables et la durée pour mesurer les choses en mouvement. La seule petite différence entre l'éternité et la durée sera que cette dernière se laisse déterminer par le temps, alors que l'éternité, dans son immensité, n'admet aucune mesure. L'éternité ne se réfère plus à la durée générique, mais au contraire, la durée se réfère à l'éternité. Quant au temps, il n'a pas de réalité objective, « il est la mesure de la durée, ou plutôt il n'est qu'un mode de pensée abstrait », (Pensées Métaphysiques, chap.10), il n'existe pas en lui-même, en acte, hors de la pensée.

           

          Pour prendre en compte ce changement de paradigme, Spinoza propose une sorte d'exercice spirituel qui consisterait à s'autoriser une pensée fréquente de l'éternité et de ses conséquences, afin de se départir du temps, cette illusion persistante, pour qu'il ne vienne plus hypostasier la durée.

          Alors, commençant ces exercices « sous le regard de l'éternité », il me vient une exigence. Désormais qu'on ne vienne pas m'emmerder plus que ça, et d'ailleurs qu'on me dévisage avec une toute autre considération. Et sait-on pourquoi je me donne soudain le droit de dire ceci, confortablement installé dans mon fauteuil, incroyablement décontracté, irradiant une fierté que je ne me connaissais pas jusqu'à présent, ayant acquis une dignité insoupçonnée, avec des lettres de noblesse dont la possession m'aurait paru invraisemblable à quelque temps de là, et surtout, sentant en parallèle avec ces affects, chaque cellule de mon corps se dilatant à l'infini ?

          Parce que, tout simplement, ici et maintenant, et comme tout un chacun, il y a de l'éternité en moi.

           

          Spinoza nous met donc directement en présence de l'éternité. Or l'éternité, ce sont, sans doute, les poètes qui en parlent le mieux. Pour Mallarmé, l'homme ne trouve pas son salut dans et par le temps mais « en l'éternité », « Tel qu'en lui-même l'éternité le change ». Avec Victor Hugo, dans la pente de la rêverie, l'esprit du rêveur... « s'en revint avec un cri terrible / Ébloui, haletant, stupide, épouvanté / Car il avait trouvé au fond l'éternité ». Julie Eloy guette « le jour premier de l'éternité », « ce jour éternel ». Et pour Rimbaud : « Elle est retrouvée / Quoi ? - L'éternité / C'est la mer allée / Avec le soleil ».

           

          Paul Maurice

           

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          Actualité du travail

          10 Janvier 2017 , Rédigé par éloge de la mollesse Publié dans #En bref

          photo GD

          photo GD

          Le travail :  Il convient d'en cerner les limites.

           

           

           

           

           

           

          photo GD

          photo GD

          Le travail, c'est creuser sa tombe.

           

           

           

           

           

           

          Actualité du travail

           

          Le travail, c'est tout ce qui reste à faire et qui attendra.

           

           

           

           

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