Le vierge, le vivace...
Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
Va-t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui !
Un cygne d'autrefois se souvient que c'est lui
Magnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n'avoir pas chanté la région où vivre
Quand du stérile hiver a resplendi l'ennui.
Tout son col secouera cette blanche agonie
Par l'espace infligée à l'oiseau qui le nie,
Mais non l'horreur du sol où le plumage est pris.
Fantôme qu'à ce lieu son pur éclat assigne,
Il s'immobilise au songe froid de mépris
Que vêt parmi l'exil inutile le Cygne.
Stéphane Mallarmé
Tu les trouves jolies, mes fesses ?
L’avenir sera critique du présent, mais aussi le présent est critique de l’avenir. Dans un cas comme dans l'autre, il s’agit, ne l'oublions pas, d’objets à construire.
Qu’y a t-il de commun entre la momie égyptienne, les masques d’or des rois mycéniens, les gisants du Moyen-Âge, les automates du 18ème siècle, et cet ultime avatar, le clone.
On pourrait ajouter à la liste, l’avenir radieux du socialisme ou la fin de l’histoire du libéralisme.
Tous ont en commun de témoigner pour cette entreprise prométhéenne qui consiste à vouloir inverser la flèche du temps. Un changement d'orientation à 180° où ce n'est plus le passé qui vient légitimer le présent mais la promesse de l'avenir
Tous, ils cherchent à délier le corps d’un passé originaire pour projeter un autre corps mais identique dans le futur.
Pour y parvenir, celui-ci devra traverser la mort ou l’histoire, entreprendre une révolution ou s’adjoindre les services de la science.
Il vise, rien moins que ce corps utopique, parfait, transfiguré, invincible, glorieux, où la jeunesse ne passe pas, éternel comme un dieu, un corps sans appartenance à une classe sociale ou qui ne connaît pas les crises, les guerres et les soubresauts de l'histoire.
Tous ils mettent en scène des corps utopiques pour donner corps à l’utopie.
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Dans la création du clone, il y a en creux, l’incomplétude de son créateur. Ce qui inverse singulièrement la relation créateur – créature, parce qu’elle place la perfection du côté de cette dernière.
Et de ce fait, on se rend compte rapidement que le clone, en tant qu’instrument parfait, n’a qu’une seule possibilité, qu’un seul destin, contenu dans ces deux termes : se révolter contre son créateur imparfait.
C’est ainsi qu’il faut l’imaginer. Le clone ne peut être qu’un clone révolté.
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Alors, cette simple question: Mais qu’est-ce qui lui a pris à Régine Gaud, de vouloir, absolument, nous rendre palpable ce clone, de nous montrer à quel point il nous est déjà familier, à quel point il est, à n’en pas douter, cette tragédie nécessaire.
C’est parce qu’elle sait, intuition d’artiste oblige, qu’il nous interroge depuis toujours. N’y a-t-il pas en chacun d’entre nous, ce désir fou, cette impérieuse nécessité de voir, enfin pris dans le mouvement de la vie, tout ce qui du corps, échappe à notre vue, à savoir, l’arrière de son crâne, son dos, ses fesses ?
Et l’inscrire dans un synoptique parfait. Un même corps multiplié, enfin conscient de lui-même dans sa totalité, qui permettrait d'éviter que se pose cette obsédante question : " Tu les trouves jolies, mes fesses ? "
par Régine Gaud. "Narcisse aurait-il aimer se faire cloner ? La réponse est oui."
Le riche et le pauvre
Et s'il n'y avait pas de vases communicants entre les riches et les pauvres, c'est-à-dire si ce n'était pas en appauvrissant les pauvres que les riches s'enrichissent. Terrifiant comme idée, non ! En tout cas plutôt iconoclaste.
La preuve en serait : Ce n'est pas parce qu'on appauvrira les riches qu'on enrichira les pauvres.
Quoiqu'il en soit, le principal souci du riche est avant tout d'imiter plus riche que lui, dans le but, bien évidemment on le comprend, d'accéder à un niveau de richesse comparable à ce dernier.
C'est ce qui occupe son esprit avant tout autre considération.Et symétriquement le principal souci du pauvre est d'imiter tout aussi pauvre que lui.
On entend dire souvent que l'ascenseur social ne fonctionne plus. Mais c'est une image. Ça veut simplement dire que désormais le modèle du riche ne fonctionne plus comme modèle imitatif pour le pauvre. Celui-ci refuse d'imiter cet autre qui est connoté péjorativement comme élite. Le riche est devenu un contre-modèle.
Sketches of Life
Happiness is a warm gun.
And tho' she feels as if she's in a play
Et elle se sent comme une comédienne
She is anyway.
Elle l'est de toutes les façons
Penny Lane, Paul Mc Cartney, 1967
Penny Lane (Penny Lane)
In Penny Lane there is a barber showing photographs
Dans Penny Lane il y a un barbier qui montre des photos
Of every head he's had the pleasure to know.
De chaque tête qu'il a eu le plaisir de connaître
And all the people that come and go
Et tous les passants qui vont et viennent
Stop and say hello.
S'arrêtent pour dire bonjour.
On the corner is a banker with a motorcar,
Au coin de la rue il y a un banquier avec une automobile.
The little children laugh at him behind his back.
Les petits enfants rient de lui dans son dos
And the banker never wears a mack
Et le banquier ne porte jamais d'imper
In the pouring rain, very strange.
Quand il pleut à verse, c'est très étrange
Penny Lane is in my ears and in my eyes.
Penny Lane est dans mes oreilles et dans mes yeux
There beneath the blue suburban skies
Là sous le ciel bleu de la banlieue
I sit, and meanwhile back
Je m'assois et je prends du recul
In penny Lane there is a fireman with an hourglass
Dans Penny Lane il y a un pompier comme un sablier
And in his pocket is a portrait of the Queen.
Et dans sa poche il a une photo de la Reine
He likes to keep his fire engine clean,
Il aime bien garder son camion de pompier propre,
It's a clean machine.
C'est un camion propre
(trumpet solo)
(solo de trompette)
Penny Lane is in my ears and in my eyes.
Penny Lane est dans mes oreilles et dans mes yeux
A four of fish and finger pies
Pleine de poissons à quatre sous et de doigts fourrés
In summer, meanwhile back
En été, et je prends du recul.
Behind the shelter in the middle of a roundabout
Derrière l'abri, au milieu du rond-point
The pretty nurse is selling poppies from a tray
La jolie infirmière vend des coquelicots sur un plateau
And tho' she feels as if she's in a play
Et elle se sent comme une comédienne
She is anyway.
Elle l'est de toute façon
In Penny Lane the barber shaves another customer,
Penny Lane le barbier rase un autre client
We see the banker sitting waiting for a trim.
On voit le banquier attendre son tour
And then the fireman rushes in
Et voilà le pompier qui entre en trombe
From the pouring rain, very strange.
Sous la forte pluie, c'est très étrange
Penny lane is in my ears and in my eyes.
Penny Lane est dans mes oreilles et dans mes yeux
There beneath the blue suburban skies
Là sous le ciel bleu de la banlieue
I sit, and meanwhile back.
Je m'assois et je prends du recul
Penny Lane is in my ears and in my eyes.
Penny Lane est dans mes oreilles et dans mes yeux
There beneath the blue suburban skies,
Là sous le ciel bleu de la banlieue
Penny Lane.
Penny Lane
Les faux procès
C'était un discours censé rendre hommage aux start-up et aux entreprises. Mais on risque de le retenir sur un tout autre sujet. Il contenait une phrase qui fait polémique depuis quelques jours s...
Juin 2017
Tout d'abord un petit rappel, Macron a dit (discours de la halle Freysinet, 27/06/2017) : "Ne pensez pas une seule seconde que si vous réussissez vos investissements ou votre start-up la chose est faite, parce que vous aurez appris dans une gare, et une gare , c'est un lieu où l'on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien, parce que c'est un lieu où l'on passe, parce que c'est un lieu qu'on partage (...) et si nous oublions cela en voulant accumuler dans un coin, on oublie d'où l'on vient et où l'on va".
S'il y a une critique à faire à ce discours, c'est l'emploi du présent à la place du conditionnel. "Des gens qui ne seraient rien" à la place de "des gens qui ne sont rien", et là aucune polémique ne voyait le jour. Mais bon !
Sinon, oui, le sens général de ce discours est une mise en garde à ceux qui pensent réussir et qui ne verraient pas plus loin que leur réussite sans comprendre qu'elle engage vis à vis des plus démunis. Cette interprétation semble tout de même évidente.
Mais bien sûr, comme comprendre un texte ou un discours est une chose difficile, un prof de français le sait par expérience quotidienne, on préfère s'engouffrer dans les lieux communs et les idées toutes faites, entendre ce qu'on veut bien entendre pour le ramener à du connu.
De toutes les façons, les gens sont à cran. On se détend un petit peu. Ce n'est tout de même pas impossible d'entendre la tonalité générale de ce discours qui consiste à dire - tant qu'à réussir autant que ce ne soit pas que pour soi - plutôt que de se focaliser sur une expression.
Voici donc revenu le temps des faux procès. On met déjà en liste les chefs d'accusation. J'ai lu quelque part que le nouveau président s'est rendu coupable à sept reprises, depuis le début de sa jeune carrière, de "mépris envers le peuple" ou encore de "mépris de classe". Sept fois comme les sept péchés capitaux.
On est là, tout d'un coup, au centre de la pensée populiste, et de sa structuration.
Pour celui qui prétend parler au nom du peuple, qui ne veut que défendre "la cause du peuple" en tant que son seul représentant légitime, le contradicteur qui ne prend pas conscience qu'il n'a qu'une chose à faire - c'est se taire - est déjà éminement suspect. Et s'il persiste dans son non-silence, la violence oratoire, qui peut très souvent recourir à l'insulte, est recommandée, la cause défendue étant sacrée. Ce qui rne manquera pas de ramener le contradicteur vers une attitude plus adéquate.
Dans la rhétorique populiste, la fin justifie les moyens.
Dans les années où cette rhétorique s'est largement développée, dans les années soixante-dix notamment, beaucoup d'intellectuels ont évoqué cette sorte de sidération qui saisit celui qui manque de se voir accusé de "mépris de classe". Une sidération qui intime le silence. Personne ne souhaite que tombe sur lui ce jugement sans appel.
Face à la montée des populistes, il pourrait être urgent de ne plus céder à cette sidération et de répondre point par point.
Dans le dernier en date des péchés présidentiels, il y a ce "les gens qui ne sont rien".
Sous le regard du populiste, n'essayons pas de recontextualiser l'expression dans le cadre général du discours, il n'y verra qu'une manoeuvre grossière et inutile visant à minimiser, ou pire encore, à excuser le propos.
Au contraire, pour lui, l'expression doit impérativement être isolée pour bien en exhiber l'ignominie. Là où le professeur de littérature s'attache à montrer le pourquoi et le comment de tel mot ou expression dans tel texte, à textualiser en somme, le populiste va s'attacher à le faire sortir du texte, celui-çi n'a plus aucune espèce d'intérêt. Il est nécessaire de détextualiser pour se concentrer juste sur le mot ou l'expression qui fait signe de la faute.
Macron et les "illettrés" de Gad : une polémique et un vrai sujet
L'info. Pour sa première interview en tant que ministre de l'Economie, mercredi sur Europe 1, Emmanuel Macron est revenu sur le dossier Gad, dont de nombreuses employées seraient "illettrées". D...
https://www.europe1.fr/economie/Macron-et-les-illettres-de-Gad-une-polemique-et-un-vrai-sujet-677004
Monologuer avec un populiste.
Vous faites une liste des écarts de langage du président Macron, d'accord ; je retiens simplement les abattoirs Gad mais je me doute que les autres exemples sont du même tonneau. Là encore, vous caricaturez, ne voulez pas contextualiser (sans doute un gros mot pour vous, mais qu'on va devoir vous opposer fréquemment). Mais prenez donc la peine d'entendre la vidéo et de lire l'article.
Sur le site d'Europe 1, on trouve écrit (17/09/2014) : " Qu’en est-il des faits ? En décembre 2013, Europe 1 précisait que le taux d’illettrisme avoisinait les 20% chez les salariés des abattoirs Gad, un chiffre confirmé mercredi par des sources syndicales. Or ce taux s’établit à 9,5% au niveau national, selon les chiffres de l’Insee datant de 2010. Le taux d’illettrisme est donc deux fois supérieur chez les employés des abattoirs, et cela s’explique : toujours selon l’Insee, l’illettrisme est plus important dans les zones rurales et augmente avec l’âge. Or la moyenne d’âge des employés Gad est de 42 ans, avec un parcours scolaire souvent raccourci. Emmanuel Macron a juste oublié de préciser qu'il s'agit d'une minorité."
Et le crime odieux de Macron contre le peuple est d'avoir dit que les ouvrières illettrées de GAD avaient de ce fait du mal à passer le permis de conduire et donc à trouver un travail. (voir la définition de l'illettrisme en bas de ce même article). Il y a là encore moins sujet à faire polémique que dans le discours de la halle Freysinet.
Donc aucun mépris de ma part mais juste une volonté de répondre avec une certaine conviction à vos approximations.
Dans l'interview à Europe1, il dit : " il y en a pour beaucoup qui sont illettrés " (20%, donc). Dans ce cas comme pour le tabagisme et l'alcoolisme dans le Nord, (déclaration du candidat Macron de janvier 2017), la généralisation du propos n'est absolument pas avérée. En fait, le dire est tout simplement faux. Dans ces deux cas, Macron s'en tient à des données statistiques. Alors a-t-on le droit de les évoquer ?
Je pense que tous ceux qui agitent le "mépris de classe" comme un étendard devraient nous dire clairement comment on peut et on doit parler de ces questions sans heurter leur susceptibilité exacerbée et sans risquer l'inculpation, mais surtout qui est autorisé à en parler .
Vous n'êtes pas rien. Quand on produit de telles diatribes avec tous les mots-clés qu'il faut - maître, oligarchie, mépris, manipulation, esclave - on peut se sentir, à bon droit, quelqu'un, je vous assure. On est un vrai rebelle, un authentique anti-système. Bravo.
En l'occurence, personne ne vous a catalogué comme "n'étant rien". Si vous daigniez simplement entendre l'ensemble du discours et ne pas vous complaire dans un malentendu voire une incompréhension.
C'est tout de même étonnant ce besoin chez beaucoup beaucoup de personnes de se penser méprisé. Ce besoin de vouloir croire absolument qu'on les méprise. Ça va loin. Ça remonte à des générations et des générations.
" Tabagisme " et " alcoolisme " dans le Nord : Emmanuel Macron dit plutôt vrai
Critiqué pour ses propos sur l'espérance de vie et les addictions dans le Nord-Pas-de-Calais, samedi 14 janvier, le candidat à la présidentielle décrit néanmoins une certaine réalité. Expli...
Janvier 2017
La force d'un mot
Étant donné tout cet infini qui me traverse de part en part et à chaque instant, et qui au bout du compte me détermine et me constitue, je ne peux pas ne pas. Je ne peux être que puissance d'affirmation. La négativité n'a pas de prise sur moi. Le "ni ni" m'est étranger. Cette pierre angulaire de toute théologie négative est une machine à mettre en accusation l'ensemble des éléments du réel. Une machine à rejeter, et une fois qu'elle a exclu tout ce qu'il y avait à exclure, c'est-à dire tout, on reste comme suspendu, dans un vide sidéral.
Alors je suis sensible à la force du " et ", à l'ajout perpétuel de réel qu'il autorise, à sa puissance d'affirmation illimitée. C'est un mot qui vaut, à la manière baroque, flaubertienne, quantique, parce qu'il a ce pouvoir d'accumuler, d'empiler les contraires.
Il y a les gros mots. Il y a les petits mots. "Et" est de ceux-ci. Un tout petit mot qui n'a l'air de rien. Pour un peu, il passerait presque inaperçu dans la langue française. On ne lui accorderait qu'un rang très inférieur, sinon même le plus inférieur. Et en même temps, une chose est sûre, il ne coûte pas cher. Il ne pèse pas lourd dans le budget d'une campagne électorale, mais il peut accessoirement la faire gagner, là où d'autres ont "failli" parce qu'il n'avaient eu recours qu'au nini.
Paul Maurice
Vous avez dit - Insoumission
Mais non. Malgré les désaccords, hors de question pour moi d'ostraciser mes amis de la France Insoumise. Je dis "mes amis" car j'en ai bien plusieurs et non pas juste un seul.
En insistant sur le nombre, je ne cherche pas à me démarquer du raciste qui dit souvent pour se montrer ouvert et tolérant : " Pas du tout, je ne suis pas raciste, j'ai même UN ami noir qui est avocat ". Mon propos n'a aucun rapport avec ce que peut dire cet individu. D'ailleurs je ne comprends pas pourquoi je le mentionne ici.
En effet, ils ne sont pas des amis pour l'exemple. Instrumentaliser pour prouver mon ouverture d'esprit. Ils étaient des amis de longue date. L'authenticité de l'amitié est donc garantie, et un beau jour, j'ai découvert qu'ils étaient insoumis. Et moi, pas du tout. Les choses se sont passées comme ça.
Seulement voilà, il arrive que MES amis de la France Insoumise soient mieux lotis que moi. Ils m'accueillent volontiers dans leur villa avec la piscine. Il n'empêche, aucune trace chez moi du moindre ressentiment. Je respecte infiniment leur insoumission.
Les transports
Tu rechercheras la compagnie des femmes, rien de plus naturel, alors autant aller à leur rencontre là où elles se trouvent - dans la rue, dans le métro, dans l'autobus, dans le train. Tu aimerais tant traverser le mur invisible qui te sépare de la jolie passante, inconnue et mystérieuse.
Ainsi, une fin d’après-midi, autour de six heures, en descendant vers la gare de Saint-Maur pour prendre un train, une fille sur le trottoir opposé remontera la rue. Son pantalon en cuir émettra un son excitant lorsque ses cuisses se croisent. Ce sera une blonde aux cheveux longs; à une vingtaine de mètres devant toi, déjà tu ne la quitteras plus des yeux. Elle s'en apercevra car arrivée à ta hauteur, elle te regardera fixement. Tu ralentiras ta marche, et même tu t’arrêteras. Elle se retournera encore deux ou trois fois, mais tu n'oseras pas la suivre. Sans doute croit-elle que tu es une ancienne connaissance qui essaie de se rappeler où tu l'as déjà vue. Finalement tu reprendras ton chemin.
Arrivé à la gare, sur les marches du passage souterrain, une fille au visage potelé te regardera tout en te dépassant. Sur le quai, elle partira dans une direction, toi, tu iras de l'autre côté bien que son pantalon, comme moulé à même la peau, te fascine. En attendant le train, il te semblera qu'elle regarde plusieurs fois dans ta direction. Avant de monter dans le wagon, elle restera quelques instants sur le marchepied à fixer l'endroit où tu te trouves.
Dans le train, encore une autre, qui viendra s'asseoir sur la banquette te faisant face, mais de l'autre côté de l'allée. Son âge sera indéfinissable, vingt ans, vingt-cinq, trente peut-être. Elle portera des lunettes rondes en métal, courte sur jambes, avec des mollets enrobés et attrayants. Au début, tu ne lui prêteras pas vraiment d'attention. Tu essaieras même de dormir. Les deux rencontres précédentes t’auront mis à bout de nerf ; mais après une station, elle t'offre son profil, quelque chose t'attire, et par jeu, tu décides de regarder intensément dans sa direction. Plusieurs fois, elle détourne entièrement son visage vers la vitre. Soudain, elle te regarde quelques instants qui durent longtemps.
Mais finalement, elle dégage une air de respectabilité qui t'arrêtera.
Après avoir plongé durant de si longues minutes dans un tel bain de sensualité tu ne comprendras plus comment on peut penser que les transports en commun sont anonymes, ennuyeux et monotones. Car ils ont ce double mérite, non seulement de transporter, mais aussi d'être en commun.
Avec un simple petit billet tu pourras toujours t’offrir un transport, c’est-à-dire cette émotion intense lorsque tu provoques le regard d'une belle inconnue, et puis tu l'affrontes.
Tu sentiras monter du plus profond de ton être de bien étranges tremblements insoupçonnés juste auparavant. Alors tout bascule, tout va changer, l'aventure est au coin de wagon, tout à l'heure, tu la suivras, tu lui parleras.
"Transport" est extrait de "Les trains que nous prenons, ceux qui partent sans nous", Christophe Eloy, 2014
Qu'est-ce qu'on s'emmerde ?
Quelque chose m'échappe. On dit que l'éducation fait la grandeur des nations, que la connaissance est la condition du développement. Or les diplômés votent plus pour les partis de gouvernement que pour les partis populistes. Et pourtant, ils seraient coupables de se soumettre à l'enfumage médiatique, et leur vote serait le plus conditionné, le plus déterminé. Alors que sur les côtés, là où l'on est moins diplômé, donc, c'est en toute conscience qu'on s'exprime par un vote libre et lucide.
Finalement, qu'est-ce qu'on s'emmerde avec les écoles, les collèges, les lycées, les universités. Liquidons les, puisqu'il faut se rendre à l'évidence, toutes ces institutions enchaînent les esprits au lieu de les faire libres. Elles empêchent de voir la vérité. Ni plus ni moins.
Qui sont les Français qui soutiennent Emmanuel Macron?
Contrairement à la critique souvent relayée, l'électorat d'Emmanuel Macron n'est pas particulièrement jeune, ni hégémonique chez les cadres. Le fondateur d'En Marche! fait en revanche le plei...
Extrait
(...) Si les autres candidats des partis de gouvernement (Benoît Hamon pour le PS et François Fillon pour les Républicains) voient également leur électorat respectif être structuré selon le niveau de diplôme, c’est dans l’électorat macronien que ce clivage est le plus marqué. L’écart de potentiel électoral entre détenteurs d’un diplôme inférieur au bac et diplômés d’un second cycle ou d’un troisième cycle du supérieur n’atteint que 6 points dans l’électorat du candidat du PS et 7 points dans celui des Républicains alors qu’il est de 12 points parmi les soutiens d’Emmanuel Macron. Ce dernier enregistre ainsi un score potentiel de 29% parmi les personnes ayant un niveau supérieur à bac+2. Il est en tête dans cette catégorie de la population et tout segment socio-démographique confondu, c’est dans cette strate qu’il enregistre aujourd’hui son meilleur résultat.
Il est donc plus exact de le présenter comme le candidat des plus diplômés que comme le candidat des CSP+. On peut penser que son cursus scolaire, ses références et son mode d’expression créent une proximité et une empathie dans la frange la plus éduquée de la population et engendre, à l’inverse, une certaine distance dans les milieux les moins bien dotés en capital culturel, davantage tentés par le FN, comme le montre le graphique ci-dessus.
Cette opposition n’est pas nouvelle et la variable du niveau de diplôme est une donnée de plus en plus centrale. Tout se passe en effet comme si la globalisation économique avait abouti à une nouvelle segmentation des sociétés occidentales entre les gagnants et les perdants de la mondialisation. Ce nouveau clivage est extrêmement puissant et il se traduit économiquement, sociologiquement, géographiquement, psychologiquement, culturellement et électoralement. Qu’il s’agisse du vote pour le Brexit en Grande-Bretagne, du second tour de l’élection présidentielle en Autriche (mettant aux prises un candidat écologiste et un candidat d’extrême-droite) ou de l’élection présidentielle américaine, cette ligne de fracture a imposé spectaculairement sa marque et concurrence voire supplante désormais parfois la traditionnelle opposition gauche/droite. Si cette opposition était indexée (certes imparfaitement) sur la classe sociale d’appartenance, le niveau d’éducation semble être la variable structurante de ce nouveau clivage comme le montrent les cas britannique, autrichien et américain.
CSP = Catégorie Socio-Professionnelle
Deus sive natura
Si tu veux trouver Dieu, cherche-le dans un cactus.
Le dieu de Spinoza n'est pas perché dans le ciel. Il est en haut, en bas, sur les côtés. Et surtout il est cause de soi et cause de tout, des cactus, comme des rhododendrons.
D'ailleurs, dans mon appartement, il y a des cactus. L'un d'entre eux, en particulier, grandit démesurément. Il grimpe toujours plus haut. Il monte. Mais jusqu'où ira-t-il ? Même le ciel ne semble pas en mesure de l'arrêter.
Paul Maurice